Extinction
"Un grain de blé reste un seul grain s'il ne tombe pas en terre et ne meurt pas."
Jean, 12, 24
Jeudi, la lumière s'est éteinte, par une pesante journée de juillet. Les machines fauchaient la moisson, elles rampaient, çà et là, près l'horizon. Le ciel, un trou vide d'azur, paressait, abêti de chaleur ; la poussière soulevée, les exhalaisons de la terre délivrée, s'en allaient avec mollesse en larges volutes.
La maison méditait, volets clos ; la famille assemblée, bouches closes. Le corps, je ne l'ai pas vu. Ni les mains diaphanes perlant l'acide. Ni son regard hors du crâne qui dut fixer droit le néant, je ne sais pas, je ne saurai jamais. Je n'ai pas voulu, je n'ai pas pu. La bonne tante qui faisait face ; le père, si grand, devenu si petit, plié, cassé, broyé.
Alors, il faut partir. Le corps ensué et l'esprit assommé, partir sans avoir su quoi dire. A nouveau un chemin, une route... un calvaire au détour du carrefour, soudain le glas languissant. Les machines continuent leur ouvrage. La moisson continue son voyage. Toujours en marche pour on ne sait où.
Que tes traversées soient douces, Lucie.